DICTIONNAIRES DES AUTEURS

 

CARR (Carol). – Signature apparue pour la première fois il y a une dizaine d’années sous des récits de science-fiction.

CONEY (Michael Greatrex). – Né en 1932, anglais de nationalité, établi au Canada. Après avoir servi dans la R.A.F. et exercé divers métiers – dont ceux de comptable et de directeur d’hôtel – il s’est mis à écrire de la science-fiction en 1969, et il s’est rapidement imposé comme un auteur capable de traiter avec originalité des thèmes familiers. À ses débuts, s’inspira surtout de trois auteurs extrêmement dissemblables, Robert A. Heinlein, Isaac Asimov et Philip K. Dick. Méfiant plutôt que pessimiste (méfiant à l’occasion contre la méfiance elle-même), Michael G. Coney est l’auteur d’une série de romans où apparaissent en particulier des extraterrestres imitant si parfaitement la forme humaine qu’ils finissent par se croire humains – Mirror Image (1972), Syzygy (1972), Charisma (1973), Brontomek (1976, Les Brontosaures mécaniques).

EMSHWILLER (Carol). – Épouse de Edmund Alexander Emshwiller (« Ed Emsh »), cinéaste et remarquable dessinateur de science-fiction, elle écrit des récits en général courts et souvent imprégnés de fantastique. Le point de vue et les sentiments des personnages y sont en général plus importants que l’action et son cadre.

FARMER (Philip José). – Né en 1918, Philip José Farmer travailla pour une compagnie d’électricité, puis pour une entreprise métallurgique, après avoir terminé son collège. Suivant des cours du soir, il obtint en 1950 une licence ès lettres et se lança alors dans une carrière littéraire. Dans le monde de la science-fiction, il apparaît comme une sorte de Janus, regardant simultanément dans deux directions opposées. Il s’est courageusement attaqué, d’une part, à des sujets naguère tabous dans le récit d’anticipation : dans The Lovers (Les Amants étrangers), écrit en 1952 et profondément remanié en 1961, il évoque des rapports sexuels entre êtres d’espèces différentes ; dans Attitudes (1952) et dans d’autres récits rattachés au même cycle, il a considéré la place du missionnaire dans une civilisation dominée par le voyage spatial. D’autre part, Philip José Farmer a donné une dimension nouvelle au récit d’aventures dans la science-fiction, en concevant des univers créés littéralement sur mesure par des héros-dieux qu’il a mis en scène dans le cycle s’ouvrant par The Maker of Universes (1965, Créateur d’Univers). Animé par un même souci de pousser aussi loin que possible les limites de son décor, il a imaginé dans le cycle de Riverworld (1965, Le Fleuve de l’Éternité) la résurrection de tous les hommes de toutes les époques sur une planète géante. Philip José Farmer a également écrit la biographie suivie de quelques personnages romanesques, qu’il s’est diverti à reconstituer d’après les récits où ces héros avaient été mis en scène : Tarzan et Doc Savage furent les premiers sujets de ces biographies para-romanesques. Farmer s’est aussi amusé à mettre en présence des personnages créés par des auteurs différents – Sherlock Holmes avec Tarzan, Hareton Ironcastle avec Doc Savage, Phileas Fogg avec le professeur Moriarty. Il a justifié ses libertés en inventant la chute d’une météorite dans le Yorkshire en 1795, météorite qui aurait provoqué des mutations chez les cochers et les passagers de deux diligences qui se trouvaient alors dans le voisinage immédiat du point de chute : Farmer a fait de nombreux personnages littéraires célèbres les descendants de ces voyageurs. Ce goût de l’écrivain pour l’interpénétration du réel et du fabulé se distingue aussi par l’introduction de ses alter ego dans l’action, généralement reconnaissables par leurs initiales identiques à celles de l’écrivain : Paul Janus Finegan, alias Kickaha, dans le cycle de The Maker of Universes, Peter Jairus Frigate dans celui de Riverworld. De même, Farmer s’est amusé à utiliser pour son roman dans Venus on the half-shelf (1971) la signature de Kilgore Trout – lequel Trout est un écrivain imaginé par Kurt Vonnegut Jr.

LAFFERTY (Raphaël Aloysius). – Né en 1914, R.A. Lafferty donna à Judith Merril (dans The year’s best S.F., 11e série) les notes suivantes en guise d’esquisse d’autoportrait : « Si j’avais eu une biographie intéressante, je n’écrirais pas de la science-fiction et du fantastique pour l’intérêt de remplacement. Je suis, dans le désordre, quinquagénaire, célibataire, ingénieur électricien, corpulent ». S’étant mis tardivement à l’activité d’écrivain, Lafferty a rapidement montré qu’il ne ressemblait à aucun autre auteur. Ses idées n’appartiennent qu’à lui, et il en va de même de son style narratif, qui peut paraître bâclé et mal équilibré de prime abord, mais qui possède en réalité une vivacité et une souplesse rythmique peu communes. Dans les univers de Lafferty, l’absurde et l’impossible peuvent se succéder sans attirer l’attention des personnages, ni heurter le lecteur. Ils suffisent, avec les étincelles d’une imagination infatigable, à justifier des récits où il n’y a ni message, ni confession. Parmi ses romans, Past Master (1968) met en scène Thomas More, appelé dans le futur pour résoudre les problèmes d’une société qui devrait être utopique – thème qui donne un aperçu de la manière dont agit la « logique » de l’auteur. Ce dernier est cependant encore plus à l’aise dans le genre de la nouvelle, dont Does Anyone Else Have Something Further to Add (1974, Lieux secrets et vilains messieurs) offre un bon recueil. R.A. Lafferty ne fera certainement pas école – il est trop inimitable pour cela – mais sa conversion de l’électronique à la littérature s’est traduite pour la science-fiction par un enrichissement aussi substantiel qu’imprévisible : une nouvelle forme de rationalisation de la démence.

PANGBORN (Edgar). – Ancien élève de l’Université de Harvard et du Conservatoire de Nouvelle-Angleterre, Edgar Pangborn (1909-1976) effectua son service militaire dans le Corps médical de l’armée des États-Unis avant de s’établir comme fermier dans le Maine et de se consacrer (à partir de 1946) à une carrière d’écrivain. Sa première nouvelle de science-fiction, Angel’s Egg, parut dans Galaxy en juin 1951. Son roman A Mirror for Observers (1954, Un miroir pour les observateurs), qui remporta l’International Fantasy Award, met en scène deux clans de Martiens dissimulés parmi les hommes et se disputant le contrôle du destin de l’humanité. Davy (1964) évoque la vie d’une communauté de survivants sur une Terre ravagée par une catastrophe, et résume assez heureusement la forme d’optimisme candide qui imprégnait souvent les récits d’Edgar Pangborn.

REED (Kit). – Pour l’officier d’état civil, Lilian Reed, née (en 1932) Craig. Journaliste, enseignante, auteur de récits, fantastiques, réalistes et de science-fiction. Dans les meilleurs de ces derniers, elle présente, sur un ton généralement paisible et sans prétention, des fables morales où l’élément scientifique reste subordonné à l’importance des problèmes humains.

STURGEON (Theodore). – Pseudonyme d’Edward Hamilton Waldo, né en 1918 d’une famille installée en Amérique depuis le XVIIe siècle et comptant beaucoup de membres du clergé. Mère divorcée en 1927 et remariée en 1929 avec un homme très autoritaire qui interdit les magazines de science-fiction à son beau-fils. Débuts en 1939 ; publie surtout du fantastique dans Unknown, accessoirement de la science-fiction dans Astounding. Lancé par It (Unknown, 1940), il reste pourtant un auteur maudit à cause de ses tendances morbides : le célèbre Bianca’s Hands (Les Mains de Bianca), écrit en 1939, ne parut qu’en 1947. La mobilisation, puis le divorce (1945), le réduisirent au silence. John W. Campbell Jr l’ayant aidé à sortir de la dépression, il reprend sa collaboration à Astounding et confie ses textes fantastiques à Weird Tales ; il n’écrit plus alors que des « histoires thérapeutiques », c’est-à-dire centrées sur un personnage de malade et cherchant comment on peut le guérir. Surtout connu comme auteur de nouvelles, il a néanmoins écrit deux excellents romans, The Dreaming Jewels (1950, Cristal qui songe) et More than Human (1954, Les plus qu’humains). Malheureusement, il reste psychologiquement vulnérable : un deuxième divorce l’ébranle à peine en 1951, mais la rupture de son troisième mariage l’atteint plus profondément à la fin des années 50 ; il cesse d’écrire de la science-fiction, vit à l’hôtel et travaille pour la télévision, ne répondant ni à son courrier ni au téléphone. À la suite d’un quatrième mariage en 1969, il reprend espoir et se remet à écrire. Bien qu’il soit un auteur instinctif, écrivant d’un seul jet sans se corriger, il est fort admiré par la « Nouvelle Vague » pour son sens du bizarre et son désir de comprendre et surtout de ressentir les émotions les plus singulières de ses personnages. Il a été critique de livres pour la National Review et Galaxy notamment. The Magazine of Fantasy and Science Fiction lui a consacré un numéro spécial en septembre 1962.

WALLACE (Floyd L.). – Apparu pour la première fois au sommaire d’Astounding en 1951, F.L. Wallace écrivit surtout pour Galaxy au cours des années suivantes des récits où fiction et science étaient habituellement équilibrées dans une recherche de la construction claire et linéaire.

WHITE (James). – Né en 1928, James White est un auteur nord-irlandais dont l’activité professionnelle s’est déroulée dans des commerces d’habillement puis dans le domaine de la publicité. La première nouvelle de science-fiction qu’il écrivit, Assisted Passage, parut dans le numéro de janvier 1953 de New Worlds, la revue londonienne dirigée à l’époque par John Carnell. James White en devint rapidement un des auteurs principaux. Ses récits se caractérisent pour la plupart par leur structure rectiligne, par l’intérêt porté aux personnages extraterrestres et à leurs rapports avec les humains, ainsi que par l’opposition entre les situations extraordinaires et les individus ordinaires qui doivent y faire face. Dans son cycle de nouvelles Sector General, commencé en 1957, James White a choisi comme décor un astéroïde artificiel qui est un hôpital spatial ouvert aux patients et aux spécialistes médicaux de toutes les races de la Galaxie. Les motifs de compréhension et de coopération, en évidence dans un tel cadre, se retrouvent dans la plupart des autres récits de l’auteur.

WILSON (Gahan). – Principalement célèbre comme caricaturiste, Gahan Wilson étudia à Chicago avant de s’établir à New York. Il se fit connaître par ses dessins dans Collier’s, puis dans Playboy et, de 1965 à 1981, il donna mois après mois dans The Magazine of Fantasy and Science Fiction des exemples souvent sublimes de différents aspects que l’humour noir graphique peut prendre sous un éclairage fantastique. Il a également écrit quelques récits de ton mesuré mais reflétant, eux aussi, une imagination non conformiste.

WOLFE (Gene). – Né en 1931. Ingénieur diplômé, rédacteur d’un magazine professionnel spécialisé. Ses récits unissent une minutieuse attention envers la science à une écriture précise, évitant les effets brutaux. Sa trilogie The lsland of Doctor Death, The Death of Doctor lsland (Nebula pour la meilleure nouvelle de 1974) et The Doctor of Death lsland (1970-1978) joue sur les relations entre le monde réel et l’imaginaire, à travers un emprisonnement suggéré par les permutations des mots dans les titres. The Fifth Head of Cerberus (1972, La Cinquième Tête de Cerbère) réunit trois nouvelles en un récit de colonisation planétaire utilisant les motifs des extraterrestres, de l’ethnologie et des clones. Gene Wolfe est un auteur original, profond, qui mériterait d’être plus largement lu – et relu.

ZELAZNY (Roger). – Né en 1937, avec des ascendances polonaise, irlandaise, hollandaise et américaine, Roger Zelazny a étudié à la Western Reserve University avant de travailler à l’administration de la Sécurité sociale des États-Unis. Depuis 1969, il se consacre à une carrière d’écrivain. Il s’était imposé comme un auteur de premier plan avec A Rose for Ecclesiastes (1963, Une rose pour l’Ecclésiaste), The Doors of his Face, the Lamps of his Mouth (1965, Son ombre dans les eaux profondes) et… And Call Me Conrad (1965, Toi l’immortel), variations sensibles et brillantes sur des thèmes connus – relations entre humains et extraterrestres, immortalité, monde post-atomique. Par la suite, Zelazny se montra souvent moins exigeant envers lui-même sur le plan de l’écriture, mais non sur celui de l’imagination. Celle-ci s’inspire chez lui aussi bien d’antiques mythologies (Lord of Light, 1967) et d’explorations psychanalytiques (The Dream Master, 1966) que de rationalisation de pouvoirs magiques (le cycle d’Ambre, commencé en 1970). Bien que classé parfois avec les représentants de la « Nouvelle Vague », Roger Zelazny possède un talent trop varié et une créativité trop originale pour qu’une telle étiquette suffise à la décrire. En 1979, un volume lui a été consacré dans la série Starmont Reader’s Guide.

 

 



[1] Orchestres particuliers aux îles Caraïbes et notamment de la Trinité, composés d'instruments à percussion fabriqués dans des barils (ou fûts) de pétrole en métal et accordés de telle sorte que chacun ne produit qu'un son.

[2] Universités américaines. (N.d.T.)

[3] Jeu de mots sur «HOME» et «ROME». (N.d.T.)

[4] Littéralement, le Blues de l'eau profonde. (N.d.T.)